Vulgarisation: Migration et nutrition des individus laissés-derrière: le cas du Ghana

Le but de ce post est de vulgariser les résultats du papier.

Résumé

Lorsqu’il est question de migration, les médias se focalisent principalement sur les migrants eux-mêmes et accordent peu d’attention aux familles et aux individus qui restent derrière. Cependant, la migration a un impact sur ces individus laissés derrière.

Dans ce travail, j’examine les effets de la migration sur la nutrition les “laissés derrière” ou “left-behind” en anglais, c’est-à-dire les individus qui restent dans le ménage après la migration d’un ou plusieurs membres de leur famille. Pour cela, j’utilise des données d’enquête réalisées au Ghana entre 2013/2014 et 2017/2018. Dans cette étude, la grande majorité des migrations, environ 95 %, sont internes au Ghana. La question que j’aborde est de savoir si la migration exerce une influence positive ou négative sur la nutrition de ceux qui restent derrière. Étonnamment, je trouve que lorsque quelqu’un migre pour chercher un emploi ailleurs, cela impacte négativement la nutrition de ceux qui restent. Les adultes subissent une légère perte de poids (environ 1 kg sur quatre ans), tandis que les enfants font face à un déclin plus significatif de leur santé nutritionnelle, comme l’indique leur score z de l’IMC pour l’âge, un indicateur qui évalue leur état nutritionnel.

J’examine également l’impact des transferts financiers vers le ménage d’origine. Il est courant que les migrants envoient de l’argent à leur famille. On pourrait s’attendre à ce que de tels transferts améliorent la nutrition des membres restés derrière en améliorant la qualité et la quantité de leur nourriture. Cependant, mes résultats révèlent un phénomène plus complexe. Lorsque l’on considère l’effet combiné d’avoir un membre migrant et de recevoir des transferts, il n’y a pas d’impact positif clair sur la nutrition. Toutefois, en se concentrant uniquement sur la réception de transferts, probablement de migrants partis depuis longtemps, on observe un effet positif sur l’état nutritionnel des enfants. Cela suggère que les effets à long terme de la migration, une fois que le migrant s’est installé et a commencé à envoyer de l’argent au pays, pourraient être bénéfiques, mais seulement après un certain temps.

Cependant, le résultat central qui explique l’effet négatif que je trouve est ce qui est appelé “l’effet perturbateur” de la migration. Ma recherche se concentre principalement sur l’impact à court terme de la migration, surtout au début, qui tend à affecter négativement la nutrition de ceux qui restent dans les ménages d’origine, en particulier les enfants. Cela peut être lié à la contrainte financière sur le ménage due aux coûts de la migration et à la perte potentielle de revenus du migrant, qui était souvent une source de revenus importante. Ainsi, le départ d’un migrant entraîne probablement une perte de revenus immédiate pour la famille, ce qui se traduit par une nutrition dégradée.

En résumé, mes résultats indiquent qu’à court terme, la migration d’un individu a un impact négatif sur la nutrition des individus qui restent derrière, principalement en raison de la perte de revenus associée. Cet effet est relativement mineur sur le poids des adultes, mais nuit considérablement à l’état nutritionnel des enfants. Malheureusement, même si l’on pourrait penser que les effets négatifs ne sont que de courte durée et que je trouve des effets positifs à long terme, ces impacts peuvent avoir des conséquences durables sur la nutrition et la croissance des enfants, étant donné qu’ils sont moins résilients que les adultes.

Enfin, bien que nous analysons le cas du Ghana, des conclusions similaires pourraient s’appliquer à d’autres pays d’Afrique subsaharienne. En effet, étant donné que la majorité des migrations sont internes, ce scénario pourrait refléter un schéma répandu dans la région, éclairant ainsi les dynamiques plus larges des migrations en Afrique subsaharienne.

Adrien Gosselin-Pali
Adrien Gosselin-Pali
PhD candidate in Development Economics

PhD candidate in Development Economics at University Clermont Auvergne, CERDI, CNRS, IRD, France.